

Région MENA : Cibler les populations clés par une stratégie communautaire
Si la région du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord (MENA) se compose de pays aux profils démographiques, culturels et socio-économiques distincts, de nombreuses similarités entre eux sur le plan épidémiologique sont observées. Ainsi, bien que les taux de prévalence du VIH dans la région comptent parmi les plus bas au monde (0,1 %), la situation reste particulièrement préoccupante au sein des populations clés et vulnérables, qui concentrent la majorité des nouveaux cas d’infections à VIH. En cause : un taux de couverture de prévention et de traitement du VIH parmi les plus faibles au monde. L’insuffisance de données f iables sur la situation et les besoins sur le terrain empêchent d’y apporter une réponse adaptée et d’améliorer durablement l’accès à ces services, ainsi qu’au dépistage. La concentration de l’épidémie au sein des populations clés explique aussi la raison pour laquelle la lutte contre le VIH reste insuffisamment considérée comme une priorité de santé publique par les décideurs de la région. Souvent stigmatisées et discriminées par un cadre juridique défavorable, celles-ci doivent être pourtant au cœur de la riposte à la pandémie.
La réponse de L'Initiative

Pour répondre efficacement à l’épidémie de VIH/sida dans la région, L’Initiative promeut des approches communautaires adaptées aux contextes de ses pays d’intervention : le Maroc, l’Algérie, la Tunisie et le Liban. Par la veille, la recherche, le plaidoyer ou l’intervention, les projets qu’elle soutient agissent au plus près des populations clés.

Témoignage de Rime Barrakad, coordinatrice de projet, ALCS Maroc
Pourquoi avoir lancé un projet qui cible l’accès à la prophylaxie préexposition (PrEP) des femmes ?
"La PrEP consiste à réduire le risque d’infection par le VIH par la prise d’une combinaison de médicaments. Si cet outil à l’efficacité prouvée est déjà accessible au Maroc, les hommes sont presque seuls à y recourir. Pourtant, il existe une forte prévalence du VIH chez les femmes travailleuses du sexe, transgenres ou partenaires d’usagers de drogues injectables. C’est la raison pour laquelle nous avons lancé ce projet, fondé sur l’implication communautaire."
Quelle stratégie avez-vous mise en place pour répondre à ce défi ?
"Ce projet associe recherche, plaidoyer et intervention avec l’appui de L’Initiative. La première phase nous a permis de récolter des données fiables auprès des populations clés, notamment sur les barrières réelles à l’accès à la PrEP. C’était essentiel pour nourrir et légitimer notre plaidoyer, mais aussi pour élaborer des plans d’action solides. Nous avons ainsi appris qu’un grand nombre de femmes travailleuses du sexe ne savaient pas lire : plutôt qu’un dépliant, nous avons donc produit une vidéo de sensibilisation. Nous avons également multiplié les centres de dispensation de la PrEP car la distance est un obstacle majeur pour les populations."
Quelles sont les prochaines étapes ?
"Si nous avons vu le recours à la PrEP par les femmes augmenter au Maroc, il faut désormais poursuivre et pérenniser nos progrès. L’objectif est aussi d’opérer un transfert d’expertise avec les autres pays de la région MENA, qui ne disposent pas encore de cet outil."

Témoignage de Souhaila Bensaid, cheffe de projet, ATP+
« Face au manque d’informations solides et utiles sur l’accès au dépistage et au traitement en Tunisie, le programme FORSS (Former, suivre, soutenir : mobilisation communautaire pour lutter contre le VIH en région MENA), porté par Solidarité Sida, a mis en place un nouvel outil : un observatoire communautaire. Cela signifie que ce sont les communautés elles-mêmes qui effectuent la collecte des données sur le terrain. Changer de méthodologie nous a aidés à mieux comprendre les besoins des personnes vivant avec le VIH. Avec le soutien de L’Initiative, nous avons ainsi pu répondre à des questions importantes pour lutter contre l’épidémie : pourquoi les centres de dépistage ne fonctionnent-ils pas bien ? Comment améliorer la prévention auprès des populations clés, comme les usagers de drogues injectables ? Pourquoi rencontrons-nous des ruptures de stock ? Toutes ces données ont renforcé notre capacité de plaidoyer et donné une visibilité essentielle aux populations clés. »